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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/836

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Didon, je me suis trouvé avoir traduit la dixième églogue, ou Gallus. Je n’en suis pas mécontent ; je vous l’envoie, et je ne serai pas fâché de savoir ce que vous en pensez. Si vous la trouvez bonne, vous pourrez la communiquer à Mme de Boisgelin, qui a déjà la copie de la huitième. Si, en revenant, vous passiez encore à Ferney, vous pourriez y parler de ce morceau, comme d’un présent que vous aurait laissé l’abbé de L’Aage, en passant à Parme avec le jeune seigneur, allemand ou russe, qu’il accompagne dans ses voyages. Cet abbé est lié avec M. votre frère de l’École militaire, chez qui vous lavez vu : vous savez d’ailleurs qu’il a été maître de quartier au collège du Plessis, et que c’est un homme d’environ trente ans. Il faudrait que ce morceau fût écrit en prose ; mais en faisant la lecture vous-même, vous pourriez essayer l’effet de cette prose, qui serait peut-être plus sensible à l’oreille qu’aux yeux. — Mais je n’imagine pas que vous repreniez votre route par Ferney, et je ne sais, toute réflexion faite, s’il faut le regretter, car peut-être cette prose déplaira-t-elle beaucoup, quand on en aura deviné le système.

Cornuau est à Tulle à finir sa carte ; il vient d’y être malade.

Le prieur de Saint-Gerald quitte Limoges pour un autre bénéfice.

Adieu, mon cher Caillard : vous savez que je serai toujours le même pour vous.


Lettre XIII. — Au même. (À Limoges, le 15 octobre 1771.)

À chaque lettre que je vous écris, mon cher Caillard, je doute toujours si elle vous arrivera à Parme. Quoi qu’il en soit, j’imagine que vous donnerez en partant, à la poste de Gênes, des instructions pour qu’on vous renvoie vos lettres ; ainsi il n’y a d’inconvénient que le retard. J’ai toujours oublié de vous répondre sur l’étonnement que vous a causé la tranquille majesté d’une masse de gypse que vous avez vue, sur le mont Cenis, braver insolemment tous les systèmes des naturalistes. Je suppose que vous êtes bien sûr que c’est en effet du gypse et non du talc, ou bien du quartz ou du spath, cristallisés en lames. Quoiqu’il en soit, ce fait ne détruit aucune partie de ma théorie : nous savions déjà, 1o que le gypse se trouve quelquefois dans l’ancien monde, ou du moins sur les limites, dans le monde moyen, de même que le sel gemme dont l’origine est, à peu de chose près, la même que celle du gypse, mais qui doit cependant être beaucoup plus rare, parce qu’il lui faut beaucoup moins d’eau pour rester dissous ; 2o que les grandes montagnes qui ne sont point volcans sont rarement de l’ancien monde, mais formées pour la plupart des masses calcaires du monde moyen à bancs parallèles, mais inclinés, massés qui, à la vérité, sont plus souvent adossées à des masses de l’ancien monde, auquel appartiennent ordinairement les pointes les plus élevées, telles que celles du Mont-Blanc. Soyez donc, comme nous, sans inquiétude sur ce gypse. — Cornuau, qui vient d’avoir une dyssenterie à Tulle, est guéri ; je compte qu’il passera son hiver à Paris, poursuivre le cours de M. Rouelle. — Ma goutte est toujours à sa fin, et ne finit point. Je ne puis encore fixer le temps de mon département, ni par conséquent celui de mon retour à Paris.

La veine pastorale continue de couler aux dépens de la veine épique. Voici encore la traduction de la seconde églogue : mutatis mutandis, et dans tout cela pas un mot de Didon. À quoi sert-il d’avoir la goutte ?