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Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/93

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malheureux qui n’avaient d’autre ressource, pour ne pas mourir de faim, que le travail de ces ateliers ; qu’ainsi j’avais pris le parti de ne plus calculer la dépense et de m’abandonner à la Providence, en laissant subsister les ateliers, sans limiter le nombre des travailleurs, jusqu’au moment où la levée des foins et des grains présenterait aux habitants de la Montagne un travail équivalent. Je n’avais d’autre ressource, pour subvenir à cette augmentation de dépense, que l’espérance que vous voudriez bien consentir à la rejeter sur les fonds d’approvisionnement qui rentreraient par la vente des grains, et je fis part de mon idée à M. d’Ormesson avec d’autant plus de confiance, que j’avais vu, par sa réponse à ma lettre du 29 mars, combien vous étiez touché de la situation de cette province, et que vous n’aviez fait aucune difficulté de m’autoriser à prendre sur les fonds d’approvisionnement à rentrer une somme de 30,000 livres pour employer au soulagement des malades, vieillards, enfants et infirmes hors d’état de travailler, j’instruisais M. d’Ormesson, par ma lettre du 21 juin, que l’excessive dépense des ateliers de charité m’avait obligé de retrancher la plus grande partie de cette aumône. En effet, je l’ai bornée à une somme de 4,000 livres pour les pauvres de la ville et de la banlieue de Tulle, où, indépendamment de la misère générale, il régnait une espèce de maladie épidémique, et à la distribution de quelques barriques de riz en faveur de quelques paroisses de la Montagne. Cette distribution de riz est détaillée dans l’état des achats et de l’emploi des riz annoncé ci-dessus et joint à cette lettre.

J’avoue que je ne croyais pas alors que la perte de l’achat à la vente des grains fût aussi considérable. Mais, quand il n’y en aurait eu aucune, et quand la totalité des fonds d’approvisionnement serait rentrée, j’aurais toujours été dans un très-grand embarras pour subvenir à la dépense journalière de ces ateliers, qui ne pouvait rouler que sur l’argent comptant, si je n’avais trouvé toutes les ressources dont j’avais besoin dans la façon de penser et dans le crédit du sieur François Ardent, qui, non content d’avoir avancé sur ses propres fonds la plus grande partie des achats de grains en 1771, en attendant la rentrée complète des ventes de 1770, a bien voulu continuer d’avancer toutes les sommes nécessaires pour les ateliers de charité, et y verser sur-le-champ tous les produits des ventes à mesure qu’ils lui rentraient. Aussi est-il encore pour cet