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Page:Varley - Une jeune fille à la page, 1938.djvu/108

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fond de vous-même, avec cet air angélique, vous ne désiriez pas autre chose ! Oh ! je ne vous condamne pas, on ne doit pas juger !…

Je répète, infiniment compréhensive, comme les baronnes du Faubourg quand elles vont voir leurs pauvres : « on ne doit pas juger ».

Mais qu’est-ce qu’il a tout à coup, qu’est-ce qui le prend ?… Il s’est levé, la voix furieuse :

— Dis donc, t’as pas fini ton boniment ?… Alors, pour deux cents balles tu crois que je vais te donner du sentiment, salope !… Tu crois que je vais te susurrer des choses !… Ah ! mince alors, si on avait que des clientes comme cela !…

Mon Dieu, que veut-il faire ? Il me saisit brusquement, il m’empoigne. Courte bagarre ; je me débats, mais il tient bon ; il est tellement serré contre moi que je commence à trouver que c’est follement intime de se battre.

Il m’a ramené les bras derrière mon dos ; il a réuni mes deux poignets dans une de ses mains, il essaie de me les ficeler avec un petit foulard qui traînait par là, sur le divan. Ça y est, il y arrive.

Mais pourquoi ? grand Dieu ! Il ne veut pas me tuer tout de même ! C’est si imprévu et je suis si étonnée que je ne peux même pas résister.

— Là, maintenant, fait-il, j’espère que tu te tiendras tranquille ; tu vas voir, je vais te faire passer tes bons sentiments !

Il rit, d’un mauvais rire ; j’ai peur ; c’est si horrible ce qui m’arrive.