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Page:Vaudere - Les Demi sexes.pdf/240

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LES DEMI-SEXES

deux époux se laissaient aller à leur rêverie, Georges tenant entre ses mains la main de Camille, dont il faisait jouer machinalement les doigts fins et tièdes, caressant sa peau douce dont il lui semblait qu’un peu de la vie se transfusait en lui.

Ils dînèrent dans le fumoir, sur une toute petite table et sans le service de domestiques. Camille trouvait son premier amant dans son mari !… Pour la première fois, elle aimait, elle se donnait, enfin, de corps et d’âme… Ils avaient des bêtises de sentiment en toute liberté, à propos de tout et de rien ; l’émotion de ce tête à tête passionné, dans cette boîte de sapin vernis, le faisait ressembler à un souper d’étudiants dans une mansarde. Tous deux mangeaient en se regardant et en se souriant. De temps en temps Camille laissait tomber sa fourchette, et, après une minute de contemplation religieuse, murmurait d’une voix grave :

— Tu es beau, mon Georges !

Et elle le voyait vraiment beau, grand et transfiguré par son amour. Il n’était plus un homme, mais l’homme qu’elle avait choisi entre tous et qui portait l’auréole superbe de cette distinction. Et, c’était curieux et amusant le