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Page:Vaudere - Les Demi sexes.pdf/74

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LES DEMI-SEXES

minait, une canaille bruyante et agressive.

Elles se montrèrent ainsi dans tous les bals de barrière, affublées de costumes sombres et de petits bonnets. Elles entraient avec un battement de cœur, s’avançaient entre les poteaux carrés qui soutiennent la salle au centre de laquelle une tribune octogone porte l’orchestre. Le long des murs des tables peintes en vert, avec des bancs de bois attendent les consommateurs. Dans l’enceinte de la danse, sous le feu aigu du gaz, des femmes en robes flétries, en corsages élimés et râpés aux coutures, montrent, dans leurs cheveux emmêlés, un peigne de corail ou des épingles d’or ; à leur cou, un ruban de couleur claire ; mais le linge fait défaut. Les jupes ont d’anciennes maculatures de boue ; toutes les figures, malgré les sourires, conservent quelque chose de triste, d’éteint et de terreux, un vague aspect sinistre où se mêle le retour de l’hôpital au retour du Mont-de-Piété. Les hommes ont des paletots, des accroche-cœurs sous la casquette et des foulards flamboyants. Tout saute et se trémousse dans un relent de vin chaud et de vieilles nippes.

Camille et Nina, vers minuit, reprenaient le fiacre qui les attendait à la porte, quittaient