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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/101

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— 1800 - 1807 —

réunissant les membres les plus influents du Sénat, du Tribunat et du Corps législatif, ils disaient : « La population et la troupe se montrent singulièrement agitées ; l’armée paraît impatiente de se prononcer en faveur d’un pouvoir héréditaire ; il faut que les grands corps politiques se hâtent de prendre l’initiative, car il y aurait, pour eux, du péril à méconnaître plus longtemps le vœu du peuple et des soldats. N’oublions pas que le Sénat romain perdit toute considération et toute influence, le jour où les Légions se saisirent du droit d’élire les Empereurs. » Puis, feignant une inquiétude sérieuse et la peur même, ils ajoutaient : « Murat a besoin de toute son énergie pour contenir l’élan de la garnison ; les régiments qui la composent ont résolu de profiter de la première revue que passera le Premier Consul pour le saluer du titre d’Empereur ! »

Ces incitations et ces rumeurs portèrent enfin leur fruit : le 3 floréal (23 avril), un membre ignoré du Tribunat, savant helléniste, docile au pouvoir comme la plupart des savants, le citoyen Curée, déposa sur le bureau de cette Assemblée une motion d’ordre où il demandait « que Napoléon Bonaparte, actuellement Premier Consul, fût déclaré Empereur des Français, et la dignité impériale rendue héréditaire dans sa famille. » Cette motion fut mise à l’ordre du jour du 10, en séance extraordinaire, et, le surlendemain de sa présentation, Bonaparte, qui jusqu’alors avait laissé sans réponse l’Adresse du Sénat, transmit à ce corps un Message où il lui disait : « Je vous invite à me faire connaître votre pensée tout entière. » Mais, avant de s’expliquer, le Sénat voulut, à son tour, attendre le résultat de la proposition de Curée, qui, le 10 floréal (30 avril), développa sa motion dans un discours dont voici le début : « Hâtons-nous, mes collègues, de demander l’hérédité de la suprême magistrature ; car, en votant l’hérédité d’un chef, comme le disait Pline à Trajan, nous empêcherons le retour d’un maître. » Le Tribunat ne comptait