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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/102

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— 1800 - 1807 —

plus alors que cinquante membres[1] : quarante-neuf se hâtèrent d’applaudir à la motion ; un seul la repoussa, l’ex-conventionnel Carnot. Adoptée à l’unanimité moins une voix, elle fut portée le 14 floréal (4 mai) au Sénat, qui reçut cette communication en félicitant les Tribuns, par l’organe de son président, « d’avoir si bien usé de cette initiative populaire et républicaine que leur avaient léguée les lois fondamentales. » Le même jour, les Sénateurs, enhardis par cet acte, répondaient au Message du Premier Consul par une nouvelle Adresse ainsi conçue :

« Vous désirez, citoyen Premier Consul, de connaître la pensée tout entière du Sénat sur celles de nos institutions qui nous ont paru devoir être perfectionnées pour assurer sans retour le triomphe de l’égalité et de la liberté publique. Le Sénat a réuni et comparé avec soin les méditations de tous ses membres, les fruits de leur expérience, les effets du zèle qui les anime pour la prospérité du peuple dont ils sont chargés de conserver les droits ; il a rappelé le passé, examiné le présent, porté ses regards sur l’avenir : il vous transmet le vœu que lui commande le salut de l’État.

Les Français ont acquis la liberté ; ils veulent conserver cette conquête ; ils veulent le repos après la victoire.

Ce repos glorieux, ils le devront au gouvernement héréditaire d’un seul, qui, élevé au-dessus de tous, investi d’une grande puissance, défende la liberté, maintienne l’égalité, et soit un obstacle invincible contre lequel vienne se briser la violence d’une tyrannie audacieuse qui se croirait absoute par la force, ainsi que les coups perfides d’un despotisme plus dangereux encore, qui, tendant dans les ténèbres ses redoutables rets, saurait attendre avec une patience hypocrite le moment de jeter le masque et de lever sa massue de fer.

Le Sénat pense, citoyen Premier Consul, qu’il est du plus grand intérêt pour le peuple français de confier le gouvernement de la République à Napoléon Bonaparte, empereur héréditaire. »

Stipuler les intérêts du peuple français était le moindre soin du Sénat. Si cette Assemblée, qui ne craignait pas de rappeler

  1. La Constitution du 22 frimaire an VIII (13 décembre 1799) en avait fixé le nombre à cent ; mais le sénatus-consulte du 16 thermidor an X (4 août 1802), qui instituait le Consulat à vie, avait réduit ce nombre à la moitié.