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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/106

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— 1800 - 1807 —

sent les historiographes de ce prince, fut pénétré d’étonnement et d’horreur. Il en appela à tous les gouvernements, à tous les rois légitimes, et, le 5 juin 1804, il adressa à toutes les cours la protestation suivante :

« En prenant le titre d’Empereur, en voulant le rendre héréditaire dans sa famille, Bonaparte vient de mettre le sceau à son usurpation. Ce nouvel acte d’une Révolution où tout, dès l’origine, a été nul, ne peut sans doute infirmer mes droits ; mais, comptable de ma conduite à tous les souverains, dont les droits ne sont pas moins lésés que les miens, et dont les trônes sont tous ébranlés par les principes que le Sénat de Paris a osé mettre en avant ; comptable à la France, à ma famille, à mon propre honneur, je croirais trahir la cause commune en gardant le silence en cette occasion. Je déclare donc, en présence de tous les souverains, que, loin de reconnaître le titre impérial que Bonaparte vient de se faire déférer par un corps qui n’a pas même d’existence légale, je proteste contre ce titre et contre tous les actes subséquents auxquels il pourrait donner lieu. »

Plaintes inutiles, protestations vaines ! Pas une voix ne répondit. Il n’existait plus alors pour l’Europe même monarchique, ni roi de France, ni parti royaliste, mais une France impériale et un empereur que vinrent solennellement saluer les ambassadeurs de toutes les puissances, et qui eut ses représentants dans toutes les capitales du continent européen. Pour l’Europe, comme pour la France, le procès de la troisième dynastie était terminé. Si les titres des descendants de Charlemagne, après avoir absorbé les droits des Mérovingiens, s’étaient éteints eux-mêmes dans les titres de la famille de Hugues Capet, les droits de cette race venaient, à leur tour, de s’éteindre dans les droits et les titres d’une quatrième dynastie, la dynastie napoléonienne. Tel était, à cette époque du moins, le sentiment général, telle était la conviction des gouvernements comme des populations. Une plus longue illusion était difficile à Louis XVIII ; l’épais bandeau qui jusqu’alors avait caché à ses regards la véritable situation des choses ne tarda pas à tomber. Quelques mois après la déclaration