Aller au contenu

Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/118

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
114
— 1800 - 1807 —

dans les premiers jours de novembre, la Fraya jetait l’ancre dans la rade anglaise d’Yarmouth.

Louis XVIII avait écrit, de Gottenbourg, au comte d’Artois pour lui annoncer sa prochaine arrivée. Cette nouvelle causa au comte un assez vif déplaisir. On sait la froideur qui régnait entre les deux frères. Jusqu’à ce moment, d’ailleurs, Monsieur avait seul conduit les affaires de l’Émigration en Angleterre. La présence du chef de sa famille ne devait pas seulement lui enlever cette direction, elle le forçait, en outre, à descendre au second rang. Ses confidents s’émurent ; ils agirent pour atténuer au moins le coup, et réussirent à persuader à M. Canning qu’il était nécessaire, dans l’intérêt même du gouvernement britannique, d’éloigner Louis XVIII de Londres et de le confiner en Écosse. Ce ministre transmit aux commandants de tous les ports l’ordre de ne pas laisser débarquer les passagers de la Fraya, et de diriger ce bâtiment sur la ville de Leith, qui est, comme on sait, le port d’Édimbourg.

Cet ordre fut communiqué à Louis XVIII par les autorités d’Yarmouth ; il refusa d’y obtempérer, et adressa au conseil des ministres une réclamation dans laquelle il disait « qu’il ne venait demander au gouvernement ni un asile, ni des secours ; que le but de son voyage était entièrement politique ; que, roi de France, il venait conférer de ses intérêts avec son frère le roi de la Grande-Bretagne, et qu’il était décidé à retourner en Russie, où il avait laissé la reine sa femme et Madame Royale, sa nièce, plutôt que de consentir à l’espèce d’exil qu’on voulait lui infliger en l’envoyant a Holyrood. »

Cette note devint l’objet de plusieurs conseils de cabinet. Les ministres anglais, après trois jours de conférences, se mirent enfin d’accord sur une réponse, et transmirent à Louis XVIII la communication suivante :

« Si le chef de la famille des Bourbons consent à vivre parmi nous d’une manière conforme à sa situation actuelle, il y trouvera un asile honorable et sûr ; mais nous connaissons trop la nécessité d’avoir, pour la