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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/124

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— 1800 - 1807 —

françaises, et y suivait avec un douloureux étonnement les changements qui se produisaient chaque jour dans les personnes et dans les choses, ainsi que les progrès toujours ascendants de la puissance impériale. Intelligence sans élévation et sans étendue, personnalité étroite, égoïste, Louis XVIII ne jugeait les événements qu’à travers le double voile de ses intérêts ou de ses préjugés ; la conscience de son titre et de ses droits dominait chez lui tous les sentiments ; il était prince et Bourbon avant d’être Français. Jacques II, assistant à la défaite de la flotte française qui devait le ramener à Londres, oubliait la chute de toutes ses espérances pour battre des mains et s’écrier : « Comme mes braves Anglais se battent bien ! » Louis XVIII ne se laissait pas emporter par le même patriotisme : chaque victoire de Napoléon ou de ses lieutenants soulevait sa critique et sa mauvaise humeur, tandis qu’il n’avait que des éloges et des applaudissements pour ceux des généraux ennemis qui réussissaient parfois à humilier nos armes. Sa correspondance, à cette époque, offre des preuves nombreuses de cette triste disposition d’esprit. « Tout va bien militairement dans la Péninsule, mal politiquement, écrivait-il au comte d’Avaray, le 5 mai 1811 ; lord Wellington avance, mais les cortès font leur possible pour tout gâter et tout perdre. » Cette Assemblée, qui devait sauver l’indépendance espagnole et conserver la couronne d’Espagne dans sa famille, avait plus d’un tort aux yeux de Louis XVIII : d’abord, elle était une assemblée élue par la nation ; en second lieu, la Grandesse espagnole, ralliée en grande partie à Joseph, n’y comptait que quelques-uns de ses membres ; il l’appelait une Assemblée monstrueuse : « Je dis monstrueuse, ajoutait-il, car je ne crois pas que les annales d’Espagne fassent mention d’une seule réunion de cortès où, comme dans celle-ci, il ne se trouve que trois personnes titrées ; ses premiers actes me rappellent ceux de 1789. » Cette correspondance offre, dans nombre de passages, une colère sans dignité contre le chef de l’Empire, que