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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/135

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— 1800 - 1807 —

véritable de son esprit : « Voilà donc un poupon dans la famille napoléonne, écrivait-il au comte d’Avaray le 2 avril 1811. Qu’il soit sorti des flancs de la malheureuse archiduchesse, ou entré chez elle par la porte de sa chambre, peu m’en chaut[1] ! Beaucoup de gens regardent cet événement comme fort important ; je ne puis être de leur avis, et voici mon dilemme : « Si Dieu a condamné le monde, B. P. ne manquera pas de successeurs ; si, au contraire, la colère divine s’apaise, toute la marmaille du monde n’empêchera pas l’édifice d’iniquité de s’écrouler. »

En plaçant ainsi son unique espérance en Dieu, Louis XVIII, évidemment, regardait sa cause comme humainement perdue. En effet, il ne fallut rien de moins que les désastres de l’hiver de 1812 à 1813, la défection du général prussien York, les progrès de l’armée russe, le soulèvement de la Prusse, la retraite successive de l’armée française derrière la Vistule, ensuite sur l’Oder, puis sur l’Elbe, pour faire poindre, aux regards fatigués de ce prince, la première lueur de ce lendemain dont nous avons parlé. Oublié depuis longtemps par les souverains du continent, il voulut réveiller chez Alexandre, que les événements posaient comme le chef de la nouvelle coalition, le souvenir de sa cause et de sa personne. Ce fut le comte Alexis de Noailles, ardent royaliste et dévot fervent, espèce d’apôtre voyageur arrivé la veille, pour ainsi dire, d’une longue exploration politique et religieuse à travers l’Europe continentale, qu’il chargea de cette mission. Il fallait un prétexte pour écrire au tzar. Louis XVIII saisit avec assez d’habileté l’occasion que lui offrait la présence en Russie de nombreux prisonniers faits pendant la retraite et dans les

  1. Allusion à un bruit que firent alors courir les partisans de l’ancienne royauté, et qui fut renouvelé par leurs adversaires, neuf ans plus tard, en 1820, à l’occasion de la naissance du duc de Bordeaux. On racontait que Marie-Louise était accouchée d’une fille à laquelle on avait substitué un enfant mâle né dans la même nuit, et également fils de Napoléon.