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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/140

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— 1813 —

son intérieur, aux lieux communs des premières félicitations : Nous avons maintenant autre chose à faire. Ce ne fut pas sans émotion, cette fois, que j’entrai dans son cabinet, et l’on devine quelle fut la curiosité de mon premier regard. Eh bien, j’affirme que rarement j’avais trouvé l’Empereur aussi calme et aussi serein. On pourra taxer de puérils les détails dans lesquels je vais entrer ; mais je ne veux pas les omettre parce qu’ils me paraissent encore ajouter quelques nuances au caractère le plus varié peut-être qui ait existé. On a comparé Napoléon a un gros diamant resté un peu brut en une partie, quand le reste était taillé en mille facettes ; je vais essayer de faire entrevoir quelques facettes encore inaperçues.

Peu de jours avant son départ pour la Russie, j’avais été menacé du plus affreux malheur : la vie de ma femme avait été en danger. Napoléon, informé du péril que je courais, avait chargé son premier médecin, M. Corvisart, de se joindre à ceux qui me donnaient déjà leur secours. Sept mois s’étaient écoulés depuis cette époque, et, ces sept mois, on sait quels événements les avaient remplis. Le premier mot de l’Empereur, en me voyant, fut de me parler de la santé de madame Mollien, et de me demander des détails sur les suites du terrible accident qu’elle avait éprouvé, sur les soins qu’on y avait donnés, et sur les précautions qui restaient à prendre. Il continuait ses questions, lorsqu’on vint lui dire que plusieurs de ses pages attendaient ses ordres ; il remit à quelques-uns d’entre eux les listes d’un assez grand nombre de familles auxquelles il faisait annoncer que tel général, tel jeune officier était revenu avec lui en Pologne, et qu’elles reverraient bientôt le père, le fils, le frère dont le sort pouvait les inquiéter. Une mission plus triste était réservée aux autres ; mais quelques faveurs nouvelles pour les familles qui avaient des pertes à regretter se joignaient aux condoléances qu’il les chargeait de leur porter. En consacrant ses premiers moments à de tels soins, Napoléon semblait obéir plus encore à son