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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/235

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— 1814 —

l’arrêtent. Un effort vigoureux le rend bientôt maître des hauteurs qui dominent le confluent de la Seine et de l’Yonne ; puis, à l’aide de batteries qu’il y fait établir à mesure qu’arrivent les pièces, il foudroie les masses wurtembergeoises alors concentrées sur les ponts et dans les rues de Montereau. Il pointe lui-même les canons de sa garde et commande les décharges. Le feu de l’artillerie ennemie n’est ni moins vif ni moins meurtrier ; les boulets sifflent de tous les côtés ; bon nombre de canonniers sont tués sur leurs pièces à côté de l’Empereur, qui conserve son calme et continue de prodiguer les encouragements et les ordres. Les soldats auxquels il est mêlé, murmurent de le voir exposer ainsi sa vie : « Allez, mes amis, répondit-il en souriant à ceux qui insistent pour qu’il se retire, le boulet qui doit me tuer n’est pas encore fondu. » Au bout de quelques heures d’un feu terrible, l’Empereur lance sur le faubourg le plus rapproché un corps de gardes nationaux bretons, arrivés depuis quelques jours et que commande le général Gérard : le faubourg est emporté. On arrive proche des ponts. Le général Pajol s’y précipite à la tête de sa cavalerie, et les enlève avec tant de vigueur et de rapidité, que les Wurtembergeois n’ont pas le temps de faire sauter une seule arche. On les poursuit dans toutes les rues, sur tous les chemins ; leurs pertes sont énormes. Cette journée du 18 février, glorieuse pour nos armes, fut une victoire inutile. La résistance des Wurtembergeois avait atteint son but : pendant la bataille, le gros des forces de Bianchi défilait rapidement à une demi-lieue de là, et, quand nos troupes arrivèrent à Fossard, elles purent apercevoir au loin, sur la route de Sens, les dernières colonnes de ce corps d’armée, dont l’arrière-garde servait de point de ralliement aux fuyards de Montereau.

Si Napoléon ne manquait pas à son génie, si nos soldats se montraient aussi braves, aussi dévoués et plus infatigables peut-être qu’à aucune autre époque de nos guerres, un grand