Aller au contenu

Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/241

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
236
— 1814 —

on échangeait des espérances encore vagues, on se cherchait pour obtenir des nouvelles ; mais on ne faisait rien au delà. Ce sont pourtant ces confidences à huis clos, ces visites inaperçues, que quelques écrivains, dupes de vanteries de châteaux ou de salons, n’ont pas craint de transformer en une vaste conspiration ayant son organisation, son mot d’ordre et ses chefs. C’est le sort de tous les gouvernements nouveaux d’avoir à subir la révélation improvisée d’une foule de dévouements avides qui ne se sont jamais montrés, d’une foule de services, taxés très-haut, qu’on ne leur a jamais rendus. Il suffit de quelques vanités cupides, donnant un appui mutuel à leurs mensonges, pour faire accepter certaines fables politiques comme autant de vérités hors de conteste. Résultat de manœuvres conçues, exécutées par quelques roués habiles, au moment même de son avénement, la Restauration, comme on le verra plus loin, ne fut l’œuvre d’aucun effort, le produit d’aucune combinaison préparés à l’avance par une opinion ou par un parti politique. Comme parti, les royalistes ne présentaient que des individualités cachées dans toutes les administrations publiques et locales, ou isolées dans leurs terres ; comme opinion, comme expression des sentiments ou des vœux d’une partie de la population, ils n’existaient plus. La population, considérée dans sa généralité, dans ses masses, se plaignait amèrement, sans doute, du régime économique et politique de l’Empire, de cette passion de conquêtes et de batailles qui avait poussé l’Empereur jusqu’aux limites de la Russie asiatique ; mais elle ne demandait ni ne désirait une contre-révolution. Loin de la, toute décimée, tout épuisée qu’elle était par les levées incessantes qui, durant vingt-deux ans de guerre, avaient alimenté les armées de la République et de l’Empire, elle soutint la cause de Napoléon, devenue, en face de l’ennemi, la cause nationale, jusqu’au dernier homme, pour ainsi dire, et jusqu’au dernier jour. Il n’est pas un seul des départements envahis par la coalition, dont les habitants