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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/264

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— 1814 —

du prince Eugène, qui garderait cette couronne en toute souveraineté pour lui et sa descendance, à perpétuité ; la princesse Élisa, sœur de Napoléon, conservait pour elle et ses descendants, en toute propriété et souveraineté, Lucques et Piombino ; enfin, la principauté de Neufchâtel et le duché de Bénévent demeuraient, l’une au maréchal Berthier, l’autre à M. de Talleyrand.

Cette contre-proposition, qui laissait à la France la Belgique, Anvers, la rive gauche du Rhin et la Savoie, était la négation formelle du projet des coalisés. Cependant les conférences ne furent pas immédiatement rompues : les plénipotentiaires alliés avaient reçu, dans la nuit, la nouvelle du mouvement de retraite de Schwartzenberg lors de la dernière panique causée par le retour de Napoléon à Reims et à Épernay, et par le seul bruit de sa marche sur la Seine. Mais, lorsque la panique fut passée et que les souverains eurent décidé de concentrer à Châlons toutes les forces de la coalition, ils décidèrent aussi que le congrès serait dissous. Le 19, un protocole final, résumé prolixe de toutes les conversations précédentes, fut signé, et les plénipotentiaires quittèrent Châtillon.

Ce congrès ne fut qu’un solennel mensonge. Ni les Alliés, ni Napoléon n’attendaient un résultat sérieux de ses travaux. Chaque matin, les instructions des plénipotentiaires variaient selon le résultat du combat livré la veille. Cependant les deux parties avaient laissé ce congrès constamment ouvert comme un instrument de rédaction et un moyen de transaction toujours prêts ; c’était un dernier recours que chacune d’elles se réservait pour le cas d’un péril suprême. L’Empereur se serait bien gardé d’en abréger la durée ; sa position était trop incertaine. Les Alliés eux-mêmes ne prirent le parti de le dissoudre que lorsqu’ils se furent résolus à réunir toutes leurs forces, à tenter un dernier et décisif effort contre la capitale de l’Empire. En changeant le plan de leurs opérations et leur champ de bataille, ils devaient également changer le théâtre