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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/280

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— 1814 —

résidence d’un parlement et centre d’une production vinicole considérable, était depuis longtemps un foyer d’opposition. Ses armateurs accusaient le blocus continental de paralyser toute spéculation maritime ; ses jeunes et nombreux légistes reprochaient à l’Empereur son antipathie bien connue pour les gens de palais, pour les avocats ; ils maudissaient surtout l’égalité inflexible et l’insatiable avidité de son système de conscription ; enfin ses négociants en vins et ses propriétaires de vignes attribuaient, aux exigences fiscales des droits réunis le bas prix de leurs marchandises ou de leurs récoltes, et le manqué de débouchés suffisants. Ce mécontentement, plus bruyant qu’actif, ne s’était jamais manifesté qu’à l’état de simples discussions de salon, ou de causeries animées au foyer du Grand-Théâtre et dans les principaux cafés de la ville ; deux ou trois compagnies de dépôt suffisaient pour le maintenir dans ces limites. Les écrivains royalistes les mieux informés signalent, il est vrai, quelques confidences échangées, dès 1810, à Hartwell, entre M. de Blacas et un négociant bordelais, M. Jacques-Sébastien Rollac ; mais ces conversations, renouvelées à différentes reprises, en 1812 et en 1813, n’aboutirent qu’à quelques envois de lettres, à quelques excursions insignifiantes, et à la nomination d’un très-ignoré commissaire royal la province de Guienne. Le duc de Wellington était entré en France depuis près de cinq mois, le duc d’Angoulême était débarqué aux portes de Bayonne depuis plus de six semaines, que les royalistes bordelais, malgré l’absence d’une force armée sérieuse, n’avaient pas encore osé concerter, en faveur des Bourbons, nous ne dirons pas une démonstration, mais une simple démarche.

Considérée dans sa généralité, la population de Bordeaux, loin de se montrer hostile au gouvernement impérial, avait au contraire saisi toutes les occasions de lui donner des preuves de dévouement. Ainsi, après la campagne de Russie, Bordeaux s’était empressé d’offrir à l’Empereur une compa-