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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/289

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— 1814 —

paix ou de la guerre. « Vous sauriez ce que fait le congrès, ajouta-t-il : la marche de ses travaux doit importer au comte d’Artois ; vous la lui feriez connaître, et vous pourriez en même temps nous en instruire. — Mais à qui m’adresser ? répondit M. de Vitrolles ; je ne suis connu personnellement d’aucun plénipotentiaire. — Peut-être M. de Talleyrand consentira-t-il à écrire quelques lignes. Dans tous les cas, je vous donnerai quelques mots de reconnaissance pour MM. de Nesselrode et de Stadion, tous deux mes anciens et intimes amis. »

M. de Vitrolles eut promptement terminé ses préparatifs. Mais, lorsqu’au moment de monter en voiture il demanda si le prince de Bénévent avait préparé quelques lignes, M. de Dalberg lui apprit qu’il n’avait rien voulu donner. Quant au dernier, il tint sa promesse : il traça sur le portefeuille du hardi voyageur, pour M. de Stadion, les noms de deux jeunes dames de Vienne, que le plénipotentiaire autrichien et lui avaient connues à la même époque ; pour M. de Nesselrode, cette recommandation laconique : Ayez confiance. Ces noms et ces mots, écrits en encre sympathique, furent les seules lettres de créance de M. de Vitrolles, qui, parti de Paris le 6 mars, arriva le surlendemain, 8, à Châtillon après de longs détours et force incidents de route. Les noms des deux Viennoises, prononcés par lui, furent une sorte de talisman qui lui valut, de la part du plénipotentiaire autrichien, l’accueil le plus cordial et le plus empressé. Il lui dit le motif de sa venue. « Vous ne saurez rien ici, lui répondit M. de Stadion ; le congrès ne fait rien et ne peut rien décider ; c’est au quartier général qu’il vous faut aller. » M. de Vitrolles partit pour Troyes, et trouva, dans MM. de Nesselrode et de Metternich, des auditeurs non moins bienveillants, mais bien plus avides encore de nouvelles. Ces ministres ignoraient l’état des choses à Paris aussi complétement que MM. de Talleyrand et de Dalberg ignoraient la position et les projets des Alliés.