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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/336

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— 1814 —

ces provisoires ou aux hôpitaux. Plus loin, au contraire, dans la partie la plus rapprochée des rues du faubourg Saint-Martin et du faubourg du Temple, la foule était compacte et agitée. Là, une sorte d’exaltation patriotique s’emparait de tous les groupes à la vue de chaque voiture qui amenait du champ de bataille des mourants ou des blessés. On interrogeait ceux-ci : « Ah ! s’écriait un soldat dont le bras droit avait été fracassé par un biscaïen, ils sont trop ! » Sur certains points, on appelait la présence de l’Empereur ; sur d’autres, on proposait de marcher à l’ennemi ; ailleurs, on demandait des armes. L’Empereur ? les dernières nouvelles qu’on avait de lui remontaient à sept jours ! Des armes ? Joseph, Clarke et Hullin, nous l’avons dit, avaient autorisé les mairies à délivrer des piques aux seuls gardes nationaux, moyennant un dépôt préalable de 10 ou de 20 francs ! Le gouvernement, d’ailleurs, où était-il ? Ses chefs, qu’étaient-ils devenus ? Depuis la veille et le matin, régente, grands dignitaires, ministres, hauts fonctionnaires, les principaux employés des administrations, tout, jusqu’au Trésor, avait disparu ; tout avait fui ! Les seules autorités qui fussent restées étaient le préfet de la Seine, le préfet de police, et les maires, fort ignorés, des douze arrondissements.

Ce désarroi, cet abandon général, inspiraient les craintes les plus vives à la classe riche de la population de Paris ; ils préoccupaient surtout 25 à 30 personnes, banquiers, commerçants, propriétaires, qui attendaient Marmont, lorsqu’à six heures du soir, après avoir fait avertir le duc de Trévise, par le général Meynadier, de la signature de l’armistice, il parut dans le salon de son hôtel de la rue de Paradis-Poissonnière. Il était à peine reconnaissable, a dit un témoin oculaire : sa barbe avait huit jours ; la redingote qui recouvrait son uniforme était en lambeaux ; de la tête aux pieds il était noir

    amputés. 150 environ furent tués, plus de 200 blessés ; quelques-uns furent faits prisonniers. La plupart se battirent en tirailleurs. Un certain nombre tinrent longtemps dans le cimetière du Père-Lachaise, dont ils avaient crénelé les murs.