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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/368

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— 1814 —

Les souverains, en proclamant qu’ils ne traiteraient plus avec Napoléon, n’avaient cependant pu déclarer qu’ils le privaient de son titre et de son autorité d’Empereur ; ils n’avaient pas renversé l’Empire, rendu le trône vacant, ni restitué la couronne aux Bourbons. Cette tâche, comme on l’a vu, était dévolue au Sénat. M. de Talleyrand n’avait pas trop présumé de la servilité de ce corps avili ; il devait en avoir la preuve le lendemain, dès son entrée, pour ainsi dire, dans la salle des séances.

Ce fut le prince de Benévent lui-même qui, en sa double qualité de vice-grand électeur de l’Empire et de vice-président du Sénat, convoqua extraordinairement, le 1er avril, les membres de cette Assemblée. Le Sénat comptait cent quarante titulaires, dont six appartenaient à la famille impériale, et vingt-sept aux départements formés par les territoires réunis à la France depuis les premières guerres de la Révolution. Quatre-vingt-dix environ se trouvaient alors à Paris. Durant la matinée, chacun d’eux fut visité, et sollicité avec les instances les plus vives de venir assister à la séance ; quelques-uns, en très-petit nombre, refusèrent d’y paraître, par dévouement pour la famille impériale ; d’autres s’abstinrent par peur ; plusieurs, qui s’étaient cachés, ne cédèrent qu’après une longue résistance ; M. de Pastoret, entre autres, ne fut découvert et entraîné qu’au bout de quatre à cinq heures de recherches et d’efforts. Enfin, à quatre heures du soir, soixante-quatre membres, dont neuf appartenaient aux départements réunis, se trouvèrent dans la salle. La séance, indiquée pour deux heures et demie, put enfin commencer ; M. de Talleyrand, tenant à la main quelques feuillets manuscrits, ouvrit la discussion en lisant, d’une voix hésitante, le discours suivant :

« Sénateurs, la lettre que j’ai eu l’honneur d’adresser à chacun de vous pour les prévenir de cette convocation leur en a fait connaître l’objet. Il s’agit de vous transmettre des propositions. Ce seul mot suffit