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Page:Vaulabelle - Histoire des deux restaurations jusqu’à l’avènement de Louis-Philippe, tome 1.djvu/388

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— 1814 —

Marmont avait fait cesser le feu en annonçant la signature de l’armistice aux officiers généraux sous ses ordres, l’un d’eux, le général de division Chastel, qui, bien que blessé, était venu, le matin, lui offrir ses services, s’indigna ; Marmont lui avait confié plusieurs détachements isolés de toutes armes dont cet officier général avait immédiatement formé une colonne de partisans. Dans ce moment, le 30e régiment de dragons venait d’écraser trois bataillons russes, formés en carré dans les vignes d’une des buttes Chaumont. Cette charge, conduite par le colonel Ordener, avait en lieu malgré le général Bordesoulle, qui criait au colonel d’arrêter, lui disant qu’il y avait capitulation signée, et que les coups qu’il portait étaient du sang inutilement répandu. « Vous feriez mieux de me donner votre réserve de cuirassiers, criait à son tour Ordener pendant qu’avec ses dragons il continuait à charger et à tuer ; en quelques instants j’aurais balayé tout le plateau ! » Le 30e reprenait sa position, lorsque parut le duc de Raguse, et c’était sur le front de ce brave régiment que se trouvait alors Chastel. « Un armistice ! disait Chastel ; c’est à n’y rien comprendre ! ce n’est pas assez de laisser l’artillerie manquer de munitions ou de lui en donner dont elle ne peut se servir, on nous ordonne de nous retirer quand nous pouvons encore nous battre ! C’est probablement ici comme sur tous les autres champs de bataille ; il y a trahison partout ! — Oui ! oui ! nous sommes trahis ! répétaient les dragons en brandissant, avec une énergie furieuse, leurs longs sabres tout teints de sang russe ; nous voulons encore nous battre ! nous ne nous retirerons pas ! »

Acteurs dans de simples scènes de détails, témoins de faits isolés, ne voyant rien au delà de ce qui se passait sur le terrain où ils luttaient, les officiers et les soldats de ces bandes héroïques ne pouvaient comprendre comment, se battant comme ils se battaient, tuant comme ils tuaient, repoussant et écrasant tous les détachements qui leur étaient