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Page:Verhaeren - Poèmes, t3.djvu/73

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les villages illusoires


Le valet blond refit la métairie ;
Il regrafa, jusques aux toits,
Au long des murs fanés et des cloisons pourries,
La robe en fleur des autrefois :
Badigeon blanc et portes vertes
Et vols entrant, par la fenêtre ouverte.
La vigne, aux pignons clairs, s’adorna d’or
Et, dans la chambre, où s’accomplit
L’amour et puis la mort,
Il fit dresser, comme un trône, le lit.

Les jours encore après les jours passèrent,
Lorsqu’en automne enfin, les cloches
Renversèrent, hors de leurs poches,
L’anniversaire.

Le valet blond s’en vint, au cimetière,
Chercher, dans son tombeau,
Celle dont le regard était si beau
Et dont le cœur était tout en lumière.
Il la dressa, devant lui seul,
Droite et grande, dans son linceul.
Et l’emporta, comme effaré
De son crime presque sacré.