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Page:Verhaeren - Poèmes, t3.djvu/74

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poèmes, iiie série


Il étala le cher squelette,
Avec douceur, sur les draps blancs.
Les vers touffus et ruisselants
Lui paraissaient une toilette
D’anneaux et de boucles aux hanches.
Les crins rouges funèbrement froissés,
Qui remuaient leurs avalanches,
Il les chauffa de ses baisers.
Il prit la morte, en ses deux bras fidèles,
Comme jadis au temps des joies,
Et le présent s’imprégna d’elle.

La chambre était restée amie
Et son âme, comme une soie,
Flottait, autour de l’endormie.

La lampe et sa flamme d’argent tissée
Se souvenait des soirs de l’amoureuse année,
Et brûlait là, ainsi qu’une pensée
Ardente encor de sa chaleur fanée.
Les grands meubles, en leurs vieux coins,
Dont la présence fut témoin
De la longue et funèbre absence,
Dressaient leurs panneaux de silence