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Page:Verhaeren - Poèmes, t3.djvu/90

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poèmes, iiie série

Il se prédit que cette rage immense,
Ces millions de désespoirs n’ayant qu’un seul amour
Ne peuvent point faire en sorte, qu’un jour,
Pour une autre équité, les temps ne recommencent
Ni que le levier d’or qui fait mouvoir les choses
Ne les tourne, vers les claires métamorphoses.

Seule, parmi les nuits qui s’enténébreront
L’heure est à prendre, où ces instants naîtront.

Pour l’entendre sonner là-bas,
Haletante, comme des pas,
Que les clameurs et les gestes se taisent,
Autour des drapeaux fous claquant au vent des thèses ;
Et qu’on dispute moins, et qu’on écoute mieux.

L’instant sera saisi par les silencieux,
Sans qu’un prodige en croix flamboie aux cieux
Ni qu’un homme divin accapare l’espace.

La foule et sa fureur qui toujours la dépasse
— Étant la force immensément hallucinée
Que darde au loin le front géant des destinées —