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Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/322

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Viens, nouvel ornement de la terre, superbe laurier, viens me prêter ton ministère pour effacer les souillures de ce sol révéré. Ô rameaux cueillis près du temple, dans les jardins du dieu, en ce lieu où, entretenue par de célestes rosées, une source éternelle arrose la chevelure sacrée du myrte, c’est avec vous que je balaie ce vestibule d’Apollon, tous les jours, au premier essor de l’aile rapide du soleil, empressé de remplir ma tâche accoutumée. Ô Pæan, ô Pæan, béni, béni sois-tu, fils de Latone ! Le noble emploi, ô Phébus, de veiller ainsi à ta porte, d’honorer le siège de tes oracles ! De quel juste orgueil ils me remplissent, ces devoirs serviles que rendent mes mains, non pas aux hommes, mais aux dieux, aux dieux immortels ! Oui, un tel travail fait ma gloire ; jamais je ne m’en lasserai. Phébus, ne suis-je pas ton fils ? Ne te dois-je pas des jours que tu soutiens. Après tant de bienfaits, il m’est bien permis d’appeler du nom de père le dieu qu’on adore en ce temple.


Ion, chez Leconte de Lisle, balaie toujours le parvis avec la branche de laurier ; mais, serviteur du beau et non plus du dieu, c’est


Afin que la blancheur vénérable du marbre
                    Éblouisse lesyeux ravis.


Si sa main agit de même, son intention a changé. Et, sensible aux beautés de la nature comme à celles de l’art, il n’arrose pas le parvis sans que son imagination le transporte aux lieux charmants où l’eau a été puisée, sans qu’il dise le chant harmonieux des sources fluant « parmi les lys lourds de rosée », sans qu’il souhaite de mettre dans sa vie la pureté des flots.

Amant de la beauté artistique, de la beauté naturelle et de la beauté morale, l’Ion de Leconte de Lisle n’est donc