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Page:Victor Baudot - Au Pays des Peaux-Rouges.djvu/70

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SIX ANS AUX MONTAGNES ROCHEUSES

trouvera facilement un autre mari.  » Dans la soirée en effet le bruit se répandait qu’elle allait reprendre un à un ses douze divorcés et les expédier lestement dans l’autre monde. Je partis trop tôt pour savoir ce que devint cette étrange Samaritaine…

Quelques jours après cet événement, on vint m’avertir qu’un petit Indien de douze ans était à la mort  ; il avait été à notre école et se préparait à la première communion. On m’avait indiqué assez vaguement l’emplacement de la tente où habitait sa famille. Je montai à cheval aussitôt et me servant des quelques mots usuels que je savais, je parvins à recueillir les informations nécessaires et trouvai cette tente sur les bords de la rivière Umatilla. J’entrai par l’ouverture basse qui sert de porte  ; au milieu, sur une jonchée de paille gisait le petit moribond  ; tout autour, des femmes étaient accroupies, immobiles et muettes comme des statues. Cette scène vraiment indienne m’est restée profondément gravée dans la mémoire. Je m’agenouillai près de l’enfant, qui me rappelait par sa pauvreté et son innocence l’Enfant de la crèche  ; il était à toute extrémité, et je ne pus que lui répéter en anglais les dernières paroles de l’Ave Maria qu’il avait appris en cette langue à l’école et qu’il parut comprendre. Il mourut peu d’instants après mon dépare.

Après les Cœurs d Alêne et les Nez-Percés, je devrais dire un mot des Têtes-Plates  ; mais nous retrouverons plus tard ces Indiens, dont la Réserve confinait dans le Montana à ma paroisse. En attendant, qu’on me permette de proposer mon opinion sur l’origine des Indiens de l’Amérique du Nord, problème intéressant, qui n’a point encore été résolu.

Pendant mes longues heures d’étude solitaire de la langue des Nez-Percés, j’avais été frappé de certaines