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Page:Victor Devogel - Légendes bruxelloises, 1903.pdf/219

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LÉGENDES BRUXELLOISES

couraient après lui, s’arrêtant s’il s’arrêtait, fuyant s’il marchait vers elles, recommençant leur poursuite s’il fuyait.

Parfois aussi, les morts tenaient conseil : assis au bord des tombeaux, enveloppés de leur drap blanc, ils se parlaient entre eux et l’on entendait le bruit de leurs os s’entre-choquant.

À ces époques lointaines, les bonnes gens de la campagne et des villes, très crédules, s’imaginaient que les châteaux en ruines ou inhabités, certaines maisons dans les cités et les villages, certains coins de pays, étaient hantés.

Et quelquefois, dans le castel antique dressant vers le ciel noir ses tours démantelées, ils croyaient ouïr un grand bruit : les fenêtres s’allumaient de feux multicolores, des ombres fantastiques dansaient aux vitres, des cris, des plaintes retentissaient et cela durait la nuit tout entière.

Ou bien encore, par les soirs éclatants de lumière lunaire, ils apercevaient soudain sur les murs de ronde du manoir, se promenant, drapé dans un voile blanc, un fantôme qui accomplissait toujours la même promenade, s’arrêtait aux mêmes endroits, faisait les mêmes gestes, venait et disparaissait aux mêmes heures, soit en s’enfonçant dans la terre en poussant un grand cri, soit en s’évanouissant comme une ombre.