Aller au contenu

Page:Vigny - Œuvres complètes, Poésies, Lemerre, 1883.djvu/51

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


CHANT TROISIÈME


CHUTE


 
D’où venez-vous, Pudeur, noble crainte, ô Mystère,
Qu’au temps de son enfance a vu naître la terre,
Fleurs de ses premiers jours qui germez parmi nous,
Rose du Paradis ! Pudeur, d’où venez-vous ?
Vous pouvez seule encor remplacer l’innocence,
Mais l’arbre défendu vous a donné naissance ;
Au charme des vertus votre charme est égal,
Mais vous êtes aussi le premier pas du mal ;
D’un chaste vêtement votre sein se décore :
Ève avant le serpent n’en avait pas encore ;
Et, si le voile pur orne votre maintien,
C’est un voile toujours, et le crime a le sien ;
Tout vous trouble, un regard blesse votre paupière,
Mais l’enfant ne craint rien, et cherche la lumière.
Sous ce pouvoir nouveau, la Vierge fléchissait,
Elle tombait déjà, car elle rougissait ;