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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/110

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romain qui voudrait imposer à une telle société l’autorité extérieure et obligatoire d’un pouvoir religieux public ? Y a-t-il quelque part des papistes qui croient que les séraphins et les chérubins ont besoin d’un pape pour les gouverner ? Et d’un autre côté, où est le protestant qui, en voyant la vérité définitive réellement acquise par « la perfection de la charité » insisterait encore sur l’emploi du libre examen ?

L’union parfaitement libre et intérieure des hommes avec la Divinité et entre eux, — c’est le but suprême, le port vers lequel nous naviguons. Nos frères occidentaux ne sont pas d’accord entre eux quant aux meilleurs moyens d’y parvenir. Les catholiques croient qu’il est plus sûr de traverser la mer ensemble dans un grand vaisseau éprouvé, construit par un maître célèbre, gouverné par un pilote habile, et muni de tout ce qui est nécessaire pour le voyage. Les protestants prétendent au contraire que chacun doit se fabriquer une nacelle à sa guise pour voguer avec plus de liberté. Cette dernière opinion, tout erronée qu’elle soit, se laisse cependant discuter. Mais que pourrait-on entreprendre contre ces soi-disant orthodoxes, selon lesquels le vrai moyen d’arriver au port c’est de s’imaginer qu’on y est déjà. C’est par là qu’ils se croient au-dessus des communions occidentales qui, à vrai dire, n’ont jamais soupçonné que la grande question religieuse puisse se résoudre si facilement.