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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/153

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corps humain tout fait, mais privé de cerveau, la tâche de se fabriquer cet organe central. Cependant puisque l’absurdité générale de la théorie ne frappe pas l’esprit de nos adversaires il nous faut entrer dans les détails de leurs projets.

En attribuant à l’un de ses pasteurs la primauté de juridiction, l’Église peut régler son choix ou bien sur des faits de l’histoire religieuse consacrés par la tradition ecclésiastique, ou bien sur des considérations d’ordre purement politique. Pour donner un simulacre de sanction religieuse à leurs prétentions nationales, les Grecs byzantins ont affirmé que leur Église avait été fondée par l’apôtre saint André qu’ils nomment Protoclète (le premier appelé). Le lien légendaire qui rattache Constantinople à cet apôtre ne pourrait, même s’il était plus solide[1], conférer à la ville impériale aucune prérogative ecclésiastique, puisque ni l’Écriture sainte, ni la tradition de l’Église n’attribue à saint André aucune espèce de primauté dans le collège apostolique. L’apôtre ne pouvait donc pas communiquer à son Église un privilège qu’il n’avait pas lui-même. Et en 451, lors du concile œcuménique de Chalcédoine, les évêques grecs, en voulant attribuer au siège de Constantinople la primauté en Orient et la seconde place dans l’Église Universelle

  1. C’est à la ville de Patras que revient le privilège d’avoir été consacrée par le martyre de saint André et d’avoir possédé en premier lieu ses reliques.