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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/237

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rattache pas à Jésus-Christ dans l’ordre naturel, il n’a pas été témoin de la vie terrestre du Seigneur et il n’a pas reçu sa mission d’une manière visible et manifeste ; et pourtant il est reconnu par tous les chrétiens comme l’un des plus grands apôtres. Son apostolat était un ministère public dans l’Église et cependant l’origine de cet apostolat — le rapport de Paul avec Jésus-Christ — est un fait mystique et miraculeux. De même qu’un phénomène d’ordre surnaturel forma le lien primordial entre Jésus-Christ et saint Paul et fit de celui-ci le vase d’élection et l’apôtre des Gentils, sans que pourtant cette mission miraculeuse empêchât l’activité ultérieure de l’apôtre d’entrer dans les conditions naturelles de la vie humaine et des événements historiques ; — de même le premier rapport entre saint Pierre et la chaire de Rome — rapport qui créa la papauté — pouvait bien tenir à un acte mystique et transcendental, ce qui n’enlève nullement à la papauté elle-même, une fois constituée, le caractère d’une institution sociale régulière se manifestant dans les conditions ordinaires de la vie terrestre. L’esprit puissant de saint Pierre, dirigé par la volonté toute-puissante de son Maître, pouvait bien, pour perpétuer le centre d’unité ecclésiastique, se fixer dans le centre de l’unité politique préformé par la Providence et faire de l’évêque de Rome l’héritier de sa primauté. Le pape, dans cette hypothèse — qui, il ne faut pas l’oublier, ne deviendrait nécessaire