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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/350

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infinie des générations, demande qu’il y ait des représentants réels de l’avenir, des hommes effectivement plus avancés dans la vie spirituelle, capables de satisfaire aux aspirations de leurs contemporains et de présenter à la société donnée son idéal, dans la mesure où elle peut le concevoir et où ils peuvent eux-mêmes le réaliser. À ces hommes de l’avenir idéal je donne le nom général de prophètes. Vulgairement on entend par là quelqu’un qui prédit l’avenir.

Entre un diseur de bonne-aventure et le vrai prophète il y a à peu près la même différence qu’entre le chef d’une bande de brigands et le souverain légitime d’un grand État, ou bien entre le père d’une famille primitive qui sacrifie aux mânes des ancêtres et le pape qui donne sa bénédiction urbi et orbi et ouvre le ciel aux âmes du purgatoire. Mais en dehors de cette différence, qui tient à la sphère d’action plus ou moins large, il y a encore une autre distinction à faire. On peut prédire l’avenir, non seulement en paroles, mais, aussi en action, en anticipant partiellement des états et des rapports qui n’appartiennent pas à la condition actuelle de l’humanité. C’est là le prophétisme proprement dit, qui présente encore des modifications et des gradations indéterminées. Le sorcier africain, par exemple, a ou prétend avoir la puissance de faire selon son bon plaisir la pluie et le beau temps. Ce pouvoir supérieur de la volonté humaine