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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/367

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resta un idéal abstrait et impuissant. Et il était juste qu’il en fût ainsi. Un résultat plus positif de la vie nationale pour les Grecs, ainsi que pour les Hindous, était non seulement impossible, mais il n’eût pas été désirable. Puisque les deux pensées les plus élevées qui inspirèrent le génie de ces deux nations — le pessimisme indien avec son Nirvâna et l’idéalisme grec avec son absorption dans l’absolu — n’étaient ni l’une ni l’autre la vérité complète et définitive, elles ne pouvaient ni ne devaient recevoir une réalisation harmonique durable. Un pessimisme nihiliste créant une organisation sociale, un idéalisme contemplatif comme pouvoir diminuant l’actualité — ce seraient là des contradictions in adjecto. Et si, malgré cette contradiction intrinsèque, les deux idées nationales imparfaites s’étaient fixées et éternisées par un équilibre extérieur de forces sociales, l’humanité n’en aurait aucun profit : il n’y aurait eu que trois Chines au lieu d’une seule.

Si l’histoire des Hébreux a présenté un caractère différent et a porté d’autres fruits, c’est que la vie nationale d’Israël était basée sur un principe religieux complet et capable d’un développement organique. Ce principe se manifesta dans la forme trinitaire de la théocratie juive où les trois pouvoirs sociaux, se déployant dans un rapport normal harmonique, préfiguraient et préparaient le Règne du vrai Messie. Nous n’oublions pas les infidélités du