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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/368

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peuple juif et les efforts répétés pour briser l’image trinitaire de la théocratie mosaïque. Nous savons bien que le roi Saül massacra les prêtres de Jahvé à Nob, et que les rois postérieurs tant à Samarie qu’à Jérusalem persécutèrent et firent périr les vrais prophètes. Mais ces faits trop certains ne doivent pas nous empêcher de reconnaître trois vérités historiques incontestables : 1° que l’idée de la théocratie trinitaire, c’est-à-dire de la coopération organique et de l’harmonie morale entre les trois pouvoirs dirigeants de la société complète, — que cette idée, tout à fait étrangère aux Hindous comme aux Hellènes, était toujours présente à la conscience d’Israël ; 2° que cette idée, dans les moments les plus solennels de l’histoire juive, prenait corps et se réalisait effectivement ; 3° que les représentants du progrès national, les hommes de l’avenir, ceux qui faisaient l’histoire — en un mot les prophètes, — n’entraient jamais dans la voie purement révolutionnaire et, tout en châtiant par leur parole inspirée les abus des prêtres et des princes nationaux, ne rejetaient jamais en principe ni le sacerdoce d’Aaron, ni la royauté de David.

Moïse, le plus grand des prophètes, ne s’arrogeait ni le pouvoir sacerdotal qu’il abandonnait à Aaron, ni le commandement militaire qu’il conférait à Josué. Il ne prétendait pas non plus à l’exercice exclusif de la puissance prophétique qu’il communiqua aux soixante-dix représentants du peuple en exprimant