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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/87

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apporte au monde, ce qu’elle a fait et ce qu’elle a encore à faire pour le bien de l’humanité entière ?

Mais, dit-on, répondre à ces questions, ce serait anticiper sur l’avenir. Oui, s’il s’agissait d’un peuple enfant, de la Russie kiévienne de saint Vladimir ou de la Russie moscovite de Jean Kalita. Mais la Russie moderne, qui depuis deux cents ans ne cesse de se manifester sur la scène de l’histoire universelle, et qui au commencement du siècle s’est mesurée avec la plus grande partie de l’Europe, — cette Russie ne devrait pas ignorer complètement où elle va, ni ce qu’elle compte faire. Que l’accomplissement de notre mission historique appartienne à l’avenir — nous le voulons bien ; mais il faut que nous ayons au moins une idée de cet avenir, et qu’il se trouve dans la Russie actuelle un germe vivant de ses destinées futures.

On ne fait pas grand’chose quand on ignore ce qu’on doit faire. Nos ancêtres du XVe siècle avaient une idée très nette de l’avenir auquel ils travaillaient — l’empire de toutes les Russies. Et nous, pour qui ce but suprême de leurs efforts est déjà un fait accompli, pouvons-nous être moins éclairés qu’eux sur notre avenir à nous, pouvons-nous croire qu’il sera réalisé sans nous, en dehors de notre pensée et de notre action ?