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Page:Vladimir Soloviev - La Russie et l Eglise Universelle, Stock, 1922.djvu/88

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CHAPITRE III.


L’ORTHODOXIE VÉRITABLE DU PEUPLE RUSSE ET LA PSEUDO-ORTHODOXIE DES THÉOLOGIENS ANTICATHOLIQUES


Le caractère éminemment religieux du peuple russe, ainsi que la tendance mystique qui se manifeste chez nous dans la philosophie, dans les lettres[1] et les arts paraît réserver à la Russie une grande mission religieuse. C’est aussi vers la religion que se tournent bon gré, malgré nos patriotes, quand ils sont pressés de déclarer en quoi consiste la vocation suprême de notre pays ou « l’idée russe », comme on l’appelle aujourd’hui. L’orthodoxie ou la religion de l’Église gréco-russe, en opposition

  1. Nos meilleurs écrivains modernes, en cédant à une aspiration religieuse plus forte que leur vocation esthétique, ont dû quitter le terrain trop étroit des belles-lettres pour se montrer avec plus ou moins de succès moralistes et réformateurs, apôtres ou prophètes. La mort prématurée de Pouschkine ne nous permet pas de juger si la tendance religieuse que révèlent ses œuvres les plus accomplies était assez profonde pour devenir avec le temps son idée dominante et lui faire abandonner le domaine de la poésie pure, comme il advint à Gogol (la « Correspondance avec mes amis » ), à Dostoïevski (le « Journal d’un écrivain » ), à L. Tolstoï (Confession, Ma religion, etc.). Il paraît que le génie russe ne trouve pas dans la production poétique son but définitif et le milieu adapté à l’incarnation de son idéal essentiellement reli-