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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/61

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turel que M. Nordberg, Suédois et témoin oculaire, ait été mieux instruit que moi étranger, et il est juste que sa grande histoire serve d’instruction pour mon petit abrégé. J’aurais renoncé entièrement à cette faible partie de mes ouvrages, si cette histoire que j’ai donnée n’avait eu quelque succès, au moins par le style, et si le public n’avait paru souhaiter que ce morceau assez intéressant fût appuyé de faits authentiques.

Au reste, il est très-faux que je me sois adressé à aucun libraire, ni indirectement ni directement, pour faire imprimer cet abrégé nouveau, qui n’est pas même commencé.

Vous me ferez plaisir, monsieur, et vous me rendrez justice, si vous voulez bien avertir, dans la préface ou dans les notes de votre ouvrage, que je ne prétends point combattre M. Nordberg, mais me réformer sur ses mémoires[1]. Je crois même que ce serait la seule note qui me conviendrait, car il me paraît fort inutile de citer les endroits où j’aurai été trompé dans mes premières éditions, puisque tous ces endroits seront corrigés dans la nouvelle. C’est sur quoi je m’abandonne à votre discrétion, étant de tout mon cœur, monsieur, etc.


1443. — À M. DE CIDEVILLE.
À Bruxelles, le 27 mai.

Je n’apprends qu’aujourd’hui, mon cher ami, que ce manuscrit de Mahomet, dont je vous destinais l’hommage depuis si longtemps, est enfin arrivé à Paris, malgré les saints inquisiteurs. Ce bon musulman est entre les mains d’un docteur de Sorbonne, nommé l’abbé Moussinot, cloître Saint-Merry, et cet abbé n’attend que vos ordres pour vous l’envoyer par la voie que vous voudrez.

Je vous prie instamment de le lire avec des yeux de critique, et non pas avec ceux d’un ami. J’ai essayé, comme vous savez, la pièce à Lille. La Noue ne s’en est pas mal trouvé mais je ne regarde les jugements de Lille que comme une sentence de juges inférieurs qui pourrait bien être cassée à votre tribunal. Vous consulter de loin, mon cher Cideville, c’est une consolation d’une si longue absence ; si je vivais avec vous, je vous consulterais tous les jours.

Pourquoi ne pouvez-vous pas faire comme le jeune Helvétius,

  1. M. de Voltaire se trompait ; il trouva dans le chapelain plus d’injures et d’erreurs que de faits intéressants ou de remarques utiles. (K.)