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Page:Weil - La Connaissance surnaturelle, 1950.djvu/84

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illimitée de triangles, mais jamais aucun triangle n’aura un côté plus grand que la somme des deux autres.

Ce jamais est l’essence de tout théorème.

(Chercher alors pourquoi à première vue la preuve par l’absurde a souvent quelque chose de peu satisfaisant ?)

Toute connaissance précise des choses qui passent découle de ces propositions éternelles qui enferment un jamais.

Les choses sont naturelles, temporelles, mais les limites des choses viennent de Dieu.

C’est ce que disent les Pythagoriciens. Il y a l’illimité et ce qui limite, et ce qui limite est Dieu. Par suite les limites sont éternelles.

Il a dit à la mer « Tu n’iras pas plus loin ».

De cela, la mathématique est la traduction et le garant.

Dieu seul vaut qu’on s’intéresse à lui, et absolument rien d’autre.

Que faut-il en conclure concernant la multitude des choses intéressantes qui ne parlent pas de Dieu ? Faut-il conclure que ce sont des prestiges du démon ?

Non, non, non. Il faut conclure qu’elles parlent de Dieu.

Il est urgent aujourd’hui de le montrer.

C’est en cela que consiste le devoir d’élever le serpent d’airain, pour qu’il soit vu et que quiconque le regarde soit sauvé.

Dans la conduite de la vie, c’est aussi la limite qui porte du temps dans l’éternité, le « jamais ».

Tu ne mangeras pas les fruits de cet arbre. Les jours se succéderont dans une variété infinie, tu les rempliras de toutes sortes de choses, mais un acte ne figurera dans aucun d’eux, l’acte de manger ces fruits.

« Tu n’ouvriras pas cette porte. Tu ne penseras pas à l’ours blanc. »

Vertu surnaturelle du tabou. On ne connaît aujourd’hui de cette vertu qu’une image pervertie, la vertu magique.

Pourtant le péché d’Adam n’a pas été la désobéis-