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Page:Weil - La Pesanteur et la Grâce, 1948.djvu/125

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Pas de trace de « je » dans la conservation. Il y en a dans la destruction. « Je » laisse sa marque sur le monde en détruisant.

Littérature et morale. Le mal imaginaire est romantique, varié, le mal réel morne, monotone, désertique, ennuyeux. Le bien imaginaire est ennuyeux ; le bien réel est toujours nouveau, merveilleux, enivrant. Donc la « littérature d’imagination » est ou ennuyeuse ou immorale (ou un mélange des deux). Elle n’échappe à cette alternative qu’en passant en quelque sorte, à force d’art, du côté de la réalité — ce que le génie seul peut faire.

Une certaine vertu inférieure est une image dégradée du bien, dont il faut se repentir, et dont il est plus difficile de se repentir que du mal. Pharisien et publicain.

Le bien comme contraire du mal lui est équivalent en un sens comme tous les contraires.

Ce que le mal viole, ce n’est pas le bien, car le bien est inviolable ; on ne viole qu’un bien dégradé.

Ce qui est directement contraire à un mal n’est jamais de l’ordre du bien supérieur. À peine au-dessus du mal, souvent ! Exemples : vol et respect bourgeois de la propriété, adultère et « hon-