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Page:Weil - La Source grecque, 1953.djvu/97

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gibilité dans les sciences qui sont à notre portée. C’est aussi une lumière transcendante.

Dès lors il semble difficile de ne pas regarder cet être comme étant Dieu et cette lumière comme étant Dieu. Il semble difficile d’interpréter ces trois notions du bien, de la vérité et de l’être autrement que comme une conception de la Trinité. (Le Bien correspondant au Père, l’être au Fils et la vérité à l’Esprit.)

Cf. Parménide, 143, e. Si l’un est, il y a l’un, l’être et le lien des deux (et de là tous les nombres). Mais c’est purement abstrait. (Si l’un est vraiment un, il n’est pas du tout.)

Nous savons par Aristote que l’Un était un des noms que Platon donnait à Dieu.

Il est évident que Platon regarde la véritable sagesse comme étant une chose surnaturelle. On ne peut pas exprimer plus nettement qu’il ne fait l’opposition entre les deux conceptions possibles de la sagesse. Ceux qui regardent la sagesse comme une acquisition possible à la nature humaine pensent que, lorsque quelqu’un est devenu sage, un travail humain a mis en lui quelque chose qui n’y était pas auparavant.

Platon pense que celui qui est parvenu à la sagesse véritable n’a rien de plus en lui qu’auparavant, parce que la sagesse n’est pas en lui, mais lui vient perpétuellement d’ailleurs, à savoir de Dieu. Lui n’a rien eu à faire sinon à se tourner vers la source de la sagesse, à se convertir.

Ce que l’homme peut faire pour l’homme, ce n’est pas lui ajouter quelque chose, mais le tourner vers la lumière qui vient d’ailleurs, d’en haut.

Cette lumière de la vérité, c’est donc l’inspiration.

L’intelligence réside dans tout homme. L’usage de l’intelligence a pour condition l’amour surnaturel (nullement une doctrine intellectualiste, au contraire).

Mais au lieu que nous pouvons changer nos regards de direction en laissant le corps immobile ou presque, il n’en est pas ainsi de l’âme. L’âme ne peut pas donner à son regard une direction nouvelle sans se tourner tout entière.