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Page:Weil - Sur la science, 1966.djvu/105

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principalement établir, parallèlement à la série des équations, la série des lignes géométriques, qu’il n’a pu d’ailleurs qu’ébaucher, et en deux manières différentes, mais que Lagrange devait construire en ses immortels travaux. L’on voit d’autre part comment c’est la même innovation qui a réduit la physique à la géométrie, et qui l’a fondée sur des comparaisons avec les phénomènes que nous rendent familiers l’expérience courante et les plus communs travaux ; comment aussi, chose qui a étonné les contemporains, Descartes, tout en imaginant toujours des mouvements, a cru devoir, pour restreindre à l’extrême la part d’esprit que la physique est forcée de sembler attribuer au monde, n’admettre autant que possible que de simples impulsions ; pourquoi enfin, après avoir fondé toute sa physique sur le mouvement, il la ruine en apparence en posant le mouvement comme purement relatif. Il apparaît aussi qu’il n’y a nulle contradiction, au contraire, à réduire l’imagination au corps humain, et à en faire, pour tout ce qui concerne le monde, l’unique instrument de la connaissance. On voit que les idées simples peuvent, à la fois être rapportées à l’esprit et considérées comme lois du monde, s’il est vrai qu’elles expriment, non le monde ni l’esprit, mais le passage que le monde laisse à l’esprit ; on voit aussi pourquoi on peut les dire créées par Dieu, puisque le rôle de Dieu à mon égard consiste à répondre en quelque sorte de l’union de l’âme avec le corps.

Les grandes corrélations, qui forment le nœud de la doctrine, apparaissent ; il n’y a plus de contradiction entre liberté et nécessité, entre idéalisme et réalisme. Pour cette dernière opposition, il suffit, pour n’être plus arrêté par elle, de remarquer que tout l’esprit est en acte dans l’application