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Page:Weil - Sur la science, 1966.djvu/200

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Un poids ne peut pas avoir d’abord telle hauteur, puis telle autre, sans passer par toutes les hauteurs intermédiaires, sans exception. La distance est une grandeur continue ; aucune géométrie, même non euclidienne, ne la représente autrement. Le temps, qui, pour les physiciens, se représente par le mouvement uniforme, c’est-à-dire par la distance, est une grandeur continue. Il en est de même pour la vitesse, rapport de la distance au temps, pour l’accélération, rapport de la vitesse au temps. Dans aucune définition de l’énergie mécanique il n’entre d’autres grandeurs que distance, vitesse, accélération, combinées à la masse ; l’action est un produit de l’énergie et du temps. L’énergie non mécanique, c’est ce qui, dans tous les phénomènes non mécaniques, est posé comme équivalent à l’énergie mécanique. Il est facile dès lors de sentir combien il est extraordinaire de parler de quanta d’énergie ou d’action.

Le plus singulier est que, lorsque Planck affirma : « La matière ne peut émettre l’énergie radiante que par quantités finies proportionnelles à la fréquence », il ne fut pas conduit à cette proposition par l’étude des phénomènes microscopiques où l’expérience permet de mesurer des seuils, mais par celle d’un phénomène macroscopique, le rayonnement noir.

La notion d’irréversibilité avait été introduite dans la conception de l’énergie par le deuxième principe de la thermodynamique, le principe de Clausius, dit principe de la dégradation de l’énergie. Cette notion avait amené celle de probabilité, par l’idée simple qu’un passage d’un état plus probable à un état moins probable est pratiquement irréversible ; si on balaie de la main des caractères d’imprimerie qui formaient un vers de Valéry, on les mettra en désordre, et si on les balaie encore de la main un