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IV

HISTOIRE DU CHARBON DE TERRE.


Débuts des houillères de Saône-et-Loire. — Intérêt qu’offre l’histoire de la houille. — Le charbon de terre chez les Chinois, les Grecs, les Romains. — La houille en France et en Angleterre, au commencement des temps modernes. — La houille au dix-huitième et au dix-neuvième siècle. — Elle donne naissance à la machine à vapeur et aux chemins de fer. — Puissance créatrice de la houille. — Exemple pris au Creusot. — Moralité.

La première date certaine que l’on puisse citer pour l’exploitation des houillères dans le département de Saône-et-Loire, remonte au seizième siècle. À cette époque une première concession de mines est faite par l’État à divers demandeurs. Les mines en France étaient alors de droit régalien, c’est-à-dire que la couronne seule pouvait en disposer. Au dix-septième siècle cette concession passa en d’autres mains ; nous avons vu ce qu’il en advint à la fin du dix-huitième siècle à propos du Creusot. Depuis, l’énorme surface concédée fut découpée en divers lots, et les concessions de Montchanin, Saint-Berain, Longpendu, Blanzy, etc., furent définitivement instituées. Les gîtes houillers de l’Autunois furent concédés à la même époque.

Cette première phase de l’exploitation marque les débuts des houillères de Saône-et-Loire. Il y a eu hésitation, tâtonnement, souvent abandon complet des mines, pendant plus de deux siècles, et tout d’un coup, il y a un siècle à peine, est venue la période de progrès et d’essor continu.


Coupe transversale de la couche de houille du Montceau, entre les puits Maugrand et Saint-Pierre. — Dressée par L. Simonin et Ed. Dumas-Vorzet d’après Manès.

Toutes nos mines en France ont passé par des périodes analogues. Dans l’Aveyron on cite telle mine déjà connue au dixième siècle ; dans la Loire telle autre mine sur laquelle les seigneurs féodaux levaient un cens dès le quatorzième siècle ; et cependant ce n’est qu’à notre époque que toutes ces exploitations ont prospéré. En Angleterre, en Allemagne, les phénomènes d’évolution ont été aussi les mêmes.

Il ne sera peut-être pas hors de saison de reprendre ici l’histoire du charbon de terre, non-seulement pour le département de Saône-et-Loire, mais pour les houillères en général. Cette histoire est pleine d’enseignements, et les lecteurs du Tour du Monde la verront peut-être passer sous leurs yeux avec quelque intérêt. Assez souvent les auteurs se bornent à raconter leurs aventures et à se mettre au premier plan dans leurs impressions de voyage ; il ne sera donc pas mal une fois de s’effacer, de porter le sujet à la hauteur où de lui-même il s’élève, et de laisser parler les faits.

L’histoire de la houille si l’on voulait la suivre pas à pas, comme les antiquaires suivent l’histoire des sociétés, commencerait avec celle du monde civilisé.

Les Chinois connaissent le charbon de terre de temps immémorial. Ils l’emploient notamment pour cuire la porcelaine. Dans certaines mines ils descendent sous le sol, avec la sonde, pour extraire le gaz combustible que les couches distillent, et s’en servent comme moyen de chauffage ou d’éclairage. Mais, en fait d’industrie, les Chinois sont toujours restés Chinois, c’est-à-dire qu’ils n’ont rien fait de hardi, qui témoigne sur une grande échelle des efforts du génie humain. Nous laisserons donc les Chinois en Chine, derrière leur grande muraille et leurs paravents, exploitant les mines depuis trois ou quatre mille ans, et nous passerons rapidement aux Grecs et aux Romains, pour arriver aux peuples modernes, où nous verrons l’extraction de la houille se développer dans les plus vastes proportions.

Les Grecs ont connu la houille. Le disciple favori d’Aristote, Théophraste, dans son Traité des pierres, cite le