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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

— Je voulé bien savoir, dit-il, comme si la discussion pouvait recommencer pour l’éclairer, lequel des trois départements est le plus… jiouli.

— Oh ! messieurs, se permit de dire Maurice, c’est une fantaisie…

Jean ajouta à demi-voix :

— Une fantaisie d’Anglais…

— Cela vous intéresse donc bien, milord ? dit la basse-taille de Montauban.

— Yes ; je voulé choisir.

— Choisir ? fit le fabricant d’armagnac.

— Pour acheter.

— Mais, acheter quoi ? dit l’Agénois, qui flairait un écoulement de ses fruits secs.

— Acheter un de vos départements. Peut-être celui des pruneaux… Compréné-vô le chose ?

Les trois Méridionaux atterrés, se consultèrent du regard, se demandant s’ils permettraient à cet Anglais de se moquer d’eux plus longtemps, de les mystifier et s’ils ne lui administreraient pas une correction exemplaire.

— En voilà un drôle de corps ! finit par dire le bouilleur de cru.

— Qu’est ce ? fit le baronnet.

— Pour un toqué d’Albion, c’est un toqué d’Albion ! observa le bourgeois de Montauban.

— Qu’est-ce, môsieur ? que dites-vous ? dit sir William en se levant, très rouge.

Tout le monde se leva avec lui.

— Ne faites pas attention, messieurs, dit Maurice, tandis que Jean ajoutait : Il est un peu… extravagant… un peu fou…

— Je suis fol… bôcoup ! s’écria le baronnet qui avait entendu ; mais je voulé acheter tout de même, pour dépenser bôcoup et faire enrager milady ! Celui qui riait de moi je boxé loui !

À ces mots il y eut une bousculade. Une carafe alla se briser sur le parquet. Malgré l’intervention de Maurice et de Jean, le baronnet fut poussé dans le vestibule, et l’un des garçons de l’hôtel, au bruit qu’ils faisaient tous, se mit à crier à la garde ! et courut chercher la police.

— Je boxé la prémier, je boxé la sécond et la troisième aussi, diabel ! hurla le baronnet, dont la tête se montait. Il prit du champ en faisant rouler ses poings pour se tenir sur la défensive.