Page:Anonyme - La goélette mystérieuse ou Les prouesses d'un policier de seize ans, 1886.djvu/39

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— Quelle condition, par exemple ?

— Mais, la famille, par exemple.

— Voulez-vous dire que M. Robert Hait n’ait pas de famille ? reprit Mlle Marsy en lui lançant un regard chargé d’éclairs.

— Il vous sera facile de vous en assurer vous même, en lui demandant qui est son père.

— Et quelle réponse pensez-vous qu’il ferait à une question aussi impertinente ?

— C’est justement ce que je serais curieux de savoir, répondit froidement M. Turner. Il y a là un petit mystère qu’il serait sans doute fort embarrassé de vous faire connaître. (M. Turner ne disait pas qu’il lui fallait être doué d’une singulière dose d’effronterie, pour soulever, à propos de M. Robert Halt, une question à laquelle il lui eut été difficile de répondre lui-même d’une façon satisfaisante, si on lui eut demandé de justifier son propre acte de baptême).

Mais trêve à cela, ajouta-t-il. Je serais désolé de faire du tort à M. Robert Halt ; et ce que j’en ai dit, tendait simplement à vous expliquer combien il a dû m’être pénible de penser que votre bienveillance et votre facilité d’accueil courraient le risque d’être interprétées, aux yeux du monde, comme des marques d’un intérêt trop vif pour un gentleman qui, selon toute conjecture, doit porter une barre sur son blason.

M. Turner s’arrêta un instant pour contempler l’effet de ses paroles ; mais cet effet fut tout autre qu’il ne s’y attendait.

M. Turner, dit Mlle Marsy, avec une voix vibrante, quand un gentleman de profession s’abaisse à des paroles d’envie et de dénigrement contre un homme d’honneur, il a perdu tout droit à la sympathie des cœurs généreux. Vous vous êtes gravement trompé, M. Turner. Vous avez voulu nuire dans mon estime, à M. Robert Halt et vous n’avez fait de tort qu’à voud-même.

— Je n’ai dit que la vérité, M. Halt est un…

— Il ne s’agit pas de savoir ce qu’il est, reprit-elle en l’interrompant avec vivacité. Mais le ton de cette conversation n’est pas assez agréable pour me donner l’envie de la continuer Je vais dire à ma mère que vous êtes au salon, M. Turner.