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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/79

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AURORA FLOYD

tourner une seule fois le dos à son auditoire ou sans s’asseoir, qu’il le fasse. S’il est réellement fidèle à son art, qu’il choisisse lui-même jusqu’à quel point il sera fidèle à la nature.

Mellish prit la main de sa femme dans la sienne, et la saisit avec une pression convulsive qui faillit briser ses doigts minces et délicats.

— Restez ici, ma chère, jusqu’à ce que je vienne vous chercher, — dit-il. — Allons, Lofthouse.

Lofthouse suivit son ami dans le vestibule, où le Colonel Maddison avait employé son temps à questionner le Capitaine marchand.

— Venez-vous, messieurs ? — dit John en passant le premier. — Allons, Colonel, et vous, Lofthouse, et vous aussi, monsieur, — ajouta-t-il en s’adressant au marin, par ici.

Les débris du dessert couvraient encore la table, mais ces messieurs ne pénétrèrent pas fort avant dans la salle à manger. John se plaça de côté pendant que les autres entraient, et, passant le dernier, il ferma la porte après lui et s’y adossa.

— Maintenant, — dit-il en se tournant brusquement du côté de Prodder, — de quoi s’agit-il ?

— Je crains que ce ne soit un suicide, ou… un… meurtre…, — répondit le marin d’une voix grave. — J’ai tout raconté à ce bon monsieur.

Le bon monsieur, c’était le Colonel Maddison, qui semblait ravi de plonger dans la conversation.

— Oui, mon cher Mellish, — dit-il avec empressement ; — notre ami, qui se dit marin, et qui était venu pour voir Mme Mellish, dont il a connu la mère lorsqu’il était enfant, m’a raconté tous les détails de cette triste affaire. Il va sans dire qu’il faut enlever le cadavre immédiatement, et plus tôt vos domestiques le feront, mieux cela vaudra. De la décision, mon cher Mellish, de la décision et une exécution prompte sont indispensables dans ces catastrophes.

— Enlever le corps ! — répéta Mellish ; — cet homme est donc mort ?