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APPENDICE. — N° II.

d’autres Religieux d’acquérir de la science et de la vertu ; 9o outrager et censurer d’autres Religieux ; 10o exciter des dissensions et des schismes parmi les Religieux.

Nous pouvons maintenant être plus brefs en ce qui touche les autres listes des dix commandements que rapportent Upham et Klaproth : elles ont cependant pour nous cet intérêt, qu’elles nous font connaître des commandements d’une portée plus générale que celle des listes du Pâṭimôkkka. Il est évident que dans ces nouvelles listes dont je n’ai pas du reste les originaux à ma disposition, il ne s’agit plus exclusivement des Religieux, mais bien de tous les hommes en général, en tant que soumis à la loi morale promulguée par le Buddha Çâkyamuni. Voici la liste des Singhalais, telle que la donne Upham : 1o ne pas tuer, 2o ne pas voler, 3o ne pas commettre d’adultère, 4o ne pas mentir, 5o ne pas calomnier, 6o ne pas employer de termes grossiers, 7o ne pas dire de ces paroles qui ne sont faites que pour nuire, 8o ne pas désirer le bien d’autrui, 9o ne pas être envieux, 10o ne pas errer sur la vraie foi, ni croire qu’elle est fausse[1]. Cette liste est, à bien peu de chose près, celle que Fr. Buchanan a reproduite d’après le P. Sangermano, qui la tenait des Barmans. Suivant cet auteur, la morale consiste à observer les cinq commandements et à s’abstenir des dix péchés. Ces péchés sont nommés par les Barmans Duzzaraik, ce qui est une transcription populaire du terme pâli dutchtcharita, en sanscrit daçtcharita, « mauvaise action. » Les trois premiers péchés sont les contraires des trois premiers commandements, 1o ne pas tuer, 2o ne pas voler, 3o ne pas commettre d’adultère. Viennent ensuite : 4o le mensonge ; 5o la discorde, 6o l’injure, 7o les vains discours. Une troisième et dernière classe de péchés est formée de trois autres fautes : 8o le désir de s’approprier le bien d’autrui, 9o l’envie, 10o l’hérésie[2]. Klaproth, dans une Vie de Buddha, dont le principal défaut est d’être trop courte, a donné d’après les Chinois une énumération des commandements moraux qui est tout à fait semblable à celle des Singhalais et des Barmans ; l’accord de ces trois listes, malgré quelques différences purement verbales, prouve suffisamment leur authenticité commune. Voici l’énumération de Klaproth : 1o ne pas tuer, 2o ne pas voler, 3o être chaste, 4o ne pas porter de faux témoignages, 5o ne pas mentir, 6o ne pas jurer, 7o éviter toute parole impure, 8o être désintéressé, 9o ne pas se venger, 10o ne pas être superstitieux[3].

Il est facile de reconnaître que la liste de Klaproth rentre presque complètement dans celle d’Upham ; il faut seulement tenir compte de quelques différences légères dans les interprétations, lesquelles viennent sans aucun doute de la différence des sources auxquelles ont puisé les divers auteurs dont j’allègue ici le témoignage. Au reste, quelque importante que soit la place occupée dans la morale buddhique par les considérations relatives aux kléça ou au mal moral, ce n’est pas la liste de ces divers kléças qui tient le premier rang dans leur théorie, dont les débuts sont à la fois si humains et si purs. Ce sont les pâpas ou dôchas, au nombre de cinq, véritables péchés qui s’attachent à la personne morale de leur auteur, décident de sa destinée future, et le suivent à travers les voies de

  1. Upham, The Mahavansi, etc. t. III, p. 12.
  2. F. Buchanan, On the relig. and liter. of the Burmas, dans Asiat. Res. t. VI, p. 271, éd. in-8o.
  3. Vie de Buddha, dans Journ. asiat., t. IV, p. 77 ; Voyez encore Neumann, Catechism of the Shamans, p. 48 suiv. dans Translat. from the Chinese, 1831.