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HIROSHIMA

payer les dépenses. En un mot, ils aiment sincèrement leur petite église et tiennent à honneur qu’elle soit digne du Dieu qui l’habite. Ils ne sont pas très nombreux : une centaine seulement, mais au moins ils sont bons et fervents.

Le Père est aussi bien connu et bien respecté de tous les autres gens du village, même de son voisin, le bonze du temple shintoïste, qui vient quelquefois causer avec lui. Un jour, paraît-il, il est venu lui faire une visite pour demander l’heure. À cette époque, l’administration des villes et des villages voulut faire un effort pour habituer les gens à garder l’heure exacte. Jusqu’ici, en effet, les Japonais ont été bien peu scrupuleux sur ce point. Vous entrez dans une maison, et si vous jetez les yeux sur l’horloge, vous remarquez qu’elle est une demi-heure, une et même deux heures en avance ou en retard. Et il n’y a que vous qui vous en étonnez ; eux, bien qu’ils sachent la chose, n’y regardent pas de si près. Le gouvernement donc a demandé aux temples et aux églises catholiques de sonner la cloche à heures fixes, au moins le matin et le soir. C’est ce qui se fait toujours depuis, dans nos petites chapelles, où l’on sonne l’Angelus trois fois par jour. Or ce bonze, s’informant de l’heure, disait au Père : « Je viens ici plutôt qu’ailleurs, parce qu’ici, vous observez la régularité, et dès que j’entends votre cloche, aussitôt je me hâte de sonner la mienne. »

Cependant, à l’heure actuelle, les conversions ne sont pas très nombreuses dans ce village. Le respect humain, l’attache aux traditions de famille, les considérations d’intérêt matériel retiennent ces pauvres gens et les empêchent de faire le pas nécessaire. Ils ont bien l’occasion de se convertir, mais on dirait que Dieu ne les trouve