Page:Cloutier - Propos japonais.pdf/317

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La plupart d’entre eux, en effet, doivent leur conversion à cette affreuse maladie. De fait, ce mal ne laissant aucun espoir de guérison, une fois atteint, le patient doit coûte que coûte se résigner à attendre la mort dans un délai plus ou moins long. Aussi, quel n’est pas le désespoir de ces pauvres lépreux, qui, n’ayant pas de croyances religieuses, ne peuvent trouver ici-bas de consolation suffisante pour apaiser leur angoisse ! Au contraire, ceux que la divine Providence conduit à la léproserie catholique saisissent avidement cette consolation mystérieusement forte, que procure notre sainte religion. Tous les lépreux qui meurent à l’hôpital se convertissent, au moins à l’article de la mort. Et l’hôpital ne désemplit pas : toujours des nouveaux remplacent ceux que la mort emporte. L’œuvre obtient un plein succès. La réputation de l’hôpital dépasse celle des deux autres léproseries, plus considérables et mieux installées, qu’il y a à Kumamoto : l’une païenne, l’autre protestante. On n’ignore pas, en effet, dans les environs, que la commisération, la tendresse, la patience, le dévouement portés jusqu’à l’héroïsme ne se trouvent qu’au petit hôpital de Biwasaki.

Près de Biwasaki se trouve un grand temple que l’on pourrait appeler le temple des lépreux. C’est là que ces malheureux viennent implorer leur guérison au pied de leurs vaines idoles et demander l’aumône aux pèlerins ou visiteurs du temple. Ils sont là assis sur le bord du chemin, montrant leurs membres gangrenés et pourrissants, suppliant les passants de leur donner de quoi vivre. Ce temple, hélas ! est un lieu d’affreuse corruption : ces lépreux, hommes et femmes, qui séjournent aux alentours dans la plus licencieuse promiscuité, crou-