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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


jugeaient, en conscience, qu’il avait agi par ordre, — ou pour faute contre l’honneur — par quatre voix contre une[1].

Dès le lendemain, le gouverneur de Paris, Zurlinden, transmit à Cavaignac le procès-verbal et le dossier du conseil[2]. À cette date (28 août), il croyait Esterhazy innocent de toute trahison, comme c’était encore le sentiment de Brisson et de Bourgeois, et de la majorité des deux Chambres. Il connaissait le mot de Cavaignac sur Esterhazy : « Je vais le sabrer… » ; il écrivit au ministre, sans se soucier de lui déplaire :

Le procès-verbal mentionne des révélations graves sur le rôle de certains officiers de l’État-Major de l’armée dans la première affaire Esterhazy. Ces révélations ont fortement impressionné le conseil d’enquête et ont eu une grande influence sur le résultat de ses votes. Le résultat est négatif pour deux questions et affirmatif — mais seulement à la majorité de trois voix contre deux — pour la question de « l’inconduite habituelle ».

En se rapportant aux usages de l’armée, il y aurait donc lieu d’user d’indulgence à l’égard du commandant Esterhazy, ou de se contenter d’une punition disciplinaire, la non activité par retrait d’emploi.

Dans le cas où vous voudriez néanmoins prononcer la réforme de cet officier supérieur, je me permets d’émettre l’avis que le rapport accompagnant le décret de réforme devrait spécifier loyalement que la réforme est prononcée pour inconduite habituelle, le conseil ayant repoussé les questions de faute contre la discipline ou contre l’honneur.

Cette lettre, la formule : « En se rapportant aux usages de l’armée », dans l’âpre mêlée des partis et des

  1. Cass., II, 187.
  2. Rennes, III, 403. Zurlinden.