Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1904, Tome 4.djvu/193

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

189

LA MORT D’HENRY

sonne n’en a rien su, Gribelin n’en a rien su… J’ai agi seul dans l’intérêt de mon pays^[1]. »

La pièce de 1894 est datée de sa main ; quand l’a-t-il datée ? « Je l’ai datée en 1894, je ne crois pas l’avoir datée après ; je ne me souviens plus. La pièce de 1896 était-elle signée ? — Je ne pense pas avoir fait la signature^[2]. — Et les enveloppes ? — Je jure que je n’ai pas fait les enveloppes. — C’est bien invraisemblable que vous ayez ajouté seulement la phrase de la fin. — Je le jure. »

À ce moment, Cavaignac, écœuré, harassé comme un homme qui s’épuise à manœuvrer une pompe d’où ne sort qu’un mince filet d’eau, commande à Henry de se retirer. Puis, se ravisant, il le rappelle. Il lui faut toute sa victoire.

Il n’avait fait encore qu’affirmer, en homme sur de son fait, âprement, mais sans preuves. L’idée lui vint de

↑ Selon Cuignet (Cass., I, 348), Cavaignac lui aurait dit : « Quand j’ai posé à Henry la question : « Avez-vous agi seul ? » j’ai saisi une hésitation dans son regard. Il m’a répondu d’abord en hésitant et en assurant peu à peu sa voix : « Oui, j’étais seul. » — Roget, au contraire, raconte « qu’Henry, après son aveu, pendant qu’il le gardait à vue, lui affirma à plusieurs reprises qu’il n’avait pas eu de complices. » (Revision, 104). « Henry m’a toujours affirmé avec la plus grande énergie qu’il n’avait pas eu de complices… Cependant, je ne suis pas très sûr qu’il n’y ait pas eu quelque inspiration ; c’est une simple impression que je donne à la Cour. » (Cass., I, 121). — Cavaignac est muet sur l’incident raconté par Cuignet. — Pour Cuignet (I, 342), le complice, c’est Du Paty.
↑ On a généralement admis, et j’ai admis également (t. II, 414), d’après le témoignage de Cuignet, qu’Henry a « inter-échangé » les signatures des deux pièces authentiques (de 1894 et de 1896) avec lesquelles il a fabriqué ses faux. D’un examen ultérieur, il semblerait résulter que l’une des deux signatures (Alexandrine) aurait été calquée sur l’autre. Henry dit « qu’il ne pense pas avoir fait la signature » ; il l’aurait donc faite.

[1] Selon Cuignet (Cass., I, 348), Cavaignac lui aurait dit : « Quand j’ai posé à Henry la question : « Avez-vous agi seul ? » j’ai saisi une hésitation dans son regard. Il m’a répondu d’abord en hésitant et en assurant peu à peu sa voix : « Oui, j’étais seul. » — Roget, au contraire, raconte « qu’Henry, après son aveu, pendant qu’il le gardait à vue, lui affirma à plusieurs reprises qu’il n’avait pas eu de complices. » (Revision, 104). « Henry m’a toujours affirmé avec la plus grande énergie qu’il n’avait pas eu de complices… Cependant, je ne suis pas très sûr qu’il n’y ait pas eu quelque inspiration ; c’est une simple impression que je donne à la Cour. » (Cass., I, 121). — Cavaignac est muet sur l’incident raconté par Cuignet. — Pour Cuignet (I, 342), le complice, c’est Du Paty.

[2] On a généralement admis, et j’ai admis également (t. II, 414), d’après le témoignage de Cuignet, qu’Henry a « inter-échangé » les signatures des deux pièces authentiques (de 1894 et de 1896) avec lesquelles il a fabriqué ses faux. D’un examen ultérieur, il semblerait résulter que l’une des deux signatures (Alexandrine) aurait été calquée sur l’autre. Henry dit « qu’il ne pense pas avoir fait la signature » ; il l’aurait donc faite.

[1]

[2]